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Chaque Rhodes a son histoire et un bon technicien me semble être d’abord quelqu’un qui sache prendre le temps de l’écouter pour la comprendre et la continuer en la sublimant. Arnaud fait indéniablement partie de cette catégorie d’hommes qui ont compris que la passion se partage mieux lorsqu’on y adjoint la patience. Sa passion pour l’instrument, son histoire, l’évolution de sa production, de la qualité des pièces qui le composent, Arnaud la communique avec une générosité, une rigueur et une qualité d’expression qui permettent un dialogue clair et sain sur le diagnostic et l’ampleur du travail à effectuer sur les deux pianos que je lui ai confié. Le premier, un MarK I Stage 73 de 1974, acheté à l’automne 1998 chez Atomic Music à College Park, Maryland était passé par l’atelier du très respecté Marcel Bourdon à Puteaux qui lui avait redonné un coup de jeune sans toutefois totalement lui permettre de s’exprimer pleinement et durablement, en dépit d’une bump mod honorable par adjonction de feutres de butée et d’un réglage des tines. De fait à presque 50 ans, mon Rhodes avait besoin de soins précis et justement calibrés pour continuer de m’accompagner longtemps. Arnaud travaille à Besançon, moi à Paris, mais cet éloignement relatif n’a jamais été un obstacle à une communication fluide et régulière pour s’entendre sur l’ambition, les attentes en termes de son et le choix des remèdes à apporter. Fiabilité du suivi, de la livraison initiale de l’instrument jusqu’à sa réception sur place après envoi d’un fichier de démo audio permettant d’apprécier le réglage et sa singularité. Arnaud prend le temps d’expliquer, de raconter et on apprend beaucoup de ces échanges. Outre un travail impeccablement réalisé sur le toucher (une vraie bump mod incluant le réajustement de l’ensemble de la harp et de chacune des touches), la mécanique et le remplacement de plusieurs tines, Arnaud m’a accompagné sur le choix d’un preamp correspondant à mes exigences et mon budget, en l’espèce, un Retroflyer, stéreo, tremolo et réglage tonal qui s’avère parfait en s’intégrant facilement derrière le namerail, sans en modifier l’authenticité ou l’aspect. A chaque étape, pas de surprise sur les coûts des pièces à remplacer, des solutions pour adapter, ajuster ou usiner plutôt que remplacer, témoignant d’une connaissance extrêmement fine et rigoureuse de chacun des organes de ce piano. Sur la cosmétique, même si cela n’est pas forcément la partie qu’il affectionne le plus, Arnaud a, là aussi, parfaitement retolexé, rénové les cornières et les chromes pour faire briller ce Rhodes comme un sou neuf. L’axe de la pédale et son berceau ont été réglés de surcroit. Ce Mark I a presque mon âge mais il me survivra très probablement. Fort de cette expérience, j’ai confié à Arnaud un Mark II de 1984 dont j’avais entrepris de remplacer moi-même vis, ressorts et grommets. Il avait besoin d’un réglage, accord et harmonisation en plus du remplacement de quelques tines et d’un allègement du jeu. Il était lourd et pataud, le voici léger et cristallin, bien que laissé en version passive, sans preamp. Une merveille qui a retrouvé une richesse harmonique tout en conservant un son mordant.